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Salut, soldat du souterrain! Toi qui t'occupes d'un petit service de distribution de matériaux métalliques faits maisons, j'aurais quelques questions à te soumettre.

1. Présentes-nous assez brièvement ton petit service de distribution en sidérurgie plastique des grottes: Année de formation, styles de prédilection, (Eventuels) changements de noms etc...

Salut Gab, bon pour faire court, j’ai créé Forgotten Wisdom Prod au dernier trimestre de 1999 comme distribution de soutien à la tape de mon « groupe » que j’avais sortie, en ayant à l’idée de faire d’autres prods, de mes projets et de ceux des autres. Finalement mes projets n’ont pas abouti, donc je me suis intéressé aux autres ! J’ai choisi FWP dès le départ, ça collait avec mon état d’esprit, et puis le nom n’a pas trop de connotations typées et ancrées dans le temps. Peut-être, si je devais renommer maintenant, je choisirais autre chose, peut-être en français, et un un mot. Bronze. Ah c’est déjà pris. Bref. Le style de prédilection à l’époque était orienté Black Metal, même si ma deuxième prod a été du Thrash (la troisième aussi, tiens). Je distribuais aussi quelques tapes de Death et Grind. C’est resté assez petit pendant quelques années, même si je sortais un catalogue, faisais des flyers. C’est à partir de 2002 et de la première sortie en CD pro, le live d’INFERNO que FWP est devenu un peu plus professionnel (déclaré en asso) et une fois le cap du CD passé, on n’est plus dans le stock de 15 cds et de 150 k7s qu’on fait au besoin.

 

2. De quelle façon te procures tu le stock de ta distro? Des échanges? Des achats en gros? Ou d'autres moyens comme le dépôt vente? Quel est à ton avis le moyen le plus simple et efficace d’avoir un gros stock en un temps records?

Oui, 90% du stock provient des échanges. C’est bien là l’intérêt du truc, échanger des prods avec des gens plus ou moins éloignés, les flyers, les timbres, et découvrir les trucs tradés, quoi. Bon passées les belles années de découverte, je suis souvent déçu, ah ah, mes goûts évoluent, et parfois y a vraiment de la merde. Je ne fais pas de dépôt vente, dans aucun sens (je n’en prends pas, ni n’en donne, c’est trop la zone pour le paiement/remboursement). Les achats en prix de gros, c’est quand je veux vraiment une prod, je prends en prix de gros. Un gros stock en un temps record ? Mmmh, rachète un stock d’une distro qui arrête ! Tous les 6 mois y en a un qui se fatigue.

 

3. Combien de commandes reçois-tu en moyenne chaque semaine, chaque mois? Une petite commande compterait combien d'articles à tes yeux? Combien pour une grosse commande? La plus grosse commande que tu ai jamais reçue pesait combien de kilos ou contenait combien d'articles? Et elle est partie dans quel pays? (Pour moi c'était chez un japonais). Quel est à ton avis le moyen le plus simple et efficace d’évacuer un gros stock en un temps records?

Mmmpfffff, je sais pas trop le nombre de commandes… Ca varie. Y a des mois assez creux et d’autres plus fastes. Alors par mois… je sais pas, entre 50 et 100. Une petite commande pour moi ça commence à un zine, une k7, un EP, un CD ou un LP… Une grosse commande, ben le total fait plus de 75 euros on dira. La plus grosse commande que j’ai reçue, ben en fait c’est moi qui ai acheté une partie de stock à quelqu’un, et c’était en deux colis. Les postiers se sont mis à deux pour soulever le colis le plus lourd, et moi j’étais seul. Mais je suis fort. M’enfin j’ai quand même pas mal transpiré pour le porter jusqu’à chez moi. Sinon, pour un client… je ne sais plus. J’ai eu une commande de 500 euros une fois, mais ça n’a pas pesé plus de 4 kilos je pense… et c’était en France. Le problème maintenant avec l’étranger est l’horrible prix des frais de port, ça décourage pas mal de monde, même si bon, ramené au prix d’un objet, prendre 50 CDs, ça ne fait pas rajouter plus de 0.5 euro par CD, mais ce genre de calcul, seuls les riches le font. On est pas non plus dans la meilleure situation en ce moment. Même dans l’underground, on le ressent. Le moyen le plus simple, ben c’est de jeter pas mal de choses, ça fait du vide, mais pas forcément de pognon. Alors baisse les prix, les pauvres seront contents. Et les rapias qui écument toutes les listes pour trouver au moins cher (et qui arrivent quand même à râler) aussi.

 

4. Quel style (Ou sous style) de musique vends tu principalement? Ta distro est-elle spécialisé dans ce segment métallique, ou la laisses tu prendre des tournants plus éclectiques au grés des microclimats, quite à te retrouves avec des piles de CDs de styles qui marchent pas trop?

Principalement, du Black Metal Ca tombe bien, j’avais choisi de faire surtout ça, puisque c’est ce que je préférais, et on ne fait bien que ce qu’on aime, non ? Au début j’avais aussi du Death, mais je me suis rendu compte que les mecs n’aimaient pas trop le mélange, et il est vrai que les idéologies sont assez contradictoires… J’ai donc arrêté le Death tendance Grind qui en plus devenait con. Le Death d’aujourd’hui, quoi. Technique, rigolo et qui plaît aux végétariens. Heureusement il y a une scène qui monte, qui se souvient des débuts morbides, et c’est un plaisir de découvrir des putains de groupes qui ont le bon esprit, et je peux diversifier la distro, en me faisant plaisir, et en espérant faire plaisir à des mecs qui se laisseront tenter, ou qui trouveront chez moi ce qu’ils cherchent. Je le fais aussi avec d’autres styles, par exemple du Heavy, au travers de nouveaux groupes qui n’ont rien à voir avec les Hammerfall etc qui sont sensés représenter le Heavy Metal Bordel écoute METALUCIFER ou PORTRAIT, tu comprendras. Evidemment, ça ne marche pas toujours, je me plante des fois et me retrouve avec du stock, mais bon. Who dares wins. Or not.

 

5. En général de quel pays arrivent les commandes? Plutôt la France, comme on y habite et que ça serait en théorie plus simple... Ou il y a aurait autant d'étrangers qui te harcèlent pour acquérir les disques tant convoités en engraissant la poste au passage ?

En majorité de France, ce qui me semble plutôt normal. Mais il est vrai que dès le départ je ne me suis pas cantonné à ce seul pays et fait mes catalogues en anglais. Le paradoxe est que maintenant je distribue quasi uniquement le catalogue papier en France, et c’est écrit en anglais ! Mais bon, ça sonne mieux en anglais qu’en français. « Du vrai métal noir pour ventilateurs ». Mais j’aime bien qu’un Japonais achète des démos de groupes français. Ou soit obligé de passer par la France pour trouver un groupe de chez lui. Plutôt cool.

 

6. De quelle manière fais tu la pub de ta distro? Le collage en masse dans les forums? Les emails de masse? Les listes papiers? Penses-tu qu'à l'heure actuelle il soit possible de gérer une distro correctement sans avoir recours aux derniers moyens de commercialisation (Site web de type portal marchand, paypal, voir un site web ou Internet tout court...) tout en proposant des styles de musique qui ne sont pas particulièrement à la mode dans le milieu? En résumé, est-ce encore possible de faire une distro du fond de sa grotte, coupé du monde, en distribuant des styles actuellement non «commerciaux»?

J’ai toujours fait des flyers, puisqu’à l’époque c’était le truc normal, et des catalogues. Enfin je suis parti de la liste recto verso au catalogue de 36 pages. Mais je fais aussi de la pub sur internet, obligé quoi, sur des forums (enfin vu le paquet de forums qui existent, rien qu’en France, je suis un petit joueur), j’envoie des emails à ceux qui ont déjà commandé, j’évite le spam sauvage… Je suis convaincu qu’il est quasi impossible de ne pas exister sur internet en terme de visibilité, DUKE par exemple n’a qu’un email (et ça a été un déchirement pour eux), avec seulement un superbe catalogue papier bien épais. Mais je pense qu’ils s’y mettront un jour. On verra. Sinon l’avenir j’en suis aussi convaincu passe par l’achat en ligne, j’ai opté pour et ça a sauvé la distro. Le problème est que les mecs sont plus foutus d’écrire une lettre et la poster, et ils ont du mal maintenant à envoyer un email, être poli bonjour/au revoir, etc, il faut que ça aille vite, pas le temps de vérifier la disponibilité, etc, hop on achète, qu’il soit 10 h du mat ou 2 h dans la nuit. Ca tue une part de l’esprit UG ouais, sans contact les mecs ratent pas mal de choses, mais ils se rattrapent en payant une fortune une démo sur ebay. Mais l’avantage d’être sur internet c’est que quelqu’un au fin fond de l’Arkansas va enfin trouver un CD que personne n’a plus sauf une distro en France qui en stocke depuis 5 ans sans en vendre un. Ca fait deux heureux au final.

 

7. Es-tu satisfait de la façon dont avance ta distro? A quel niveau places-tu la satisfaction? As-tu été contraint de revoir tes exigences à la baisse depuis tes débuts, ou tout se passe plutôt comme tu l'entendais?

Oui, je suis satisfait. J’atteins le niveau où je ne peux plus trop évoluer dans le temps imparti pour gérer le label et la distro, c’est à dire après le boulot et les week ends… Et puis j’ai évolué depuis les débuts avec les pochettes de k7s photocopiées à maintenant où j’ai sorti des CDs, EPs, LPs et même une pro tape ! Les exigences, je les ai revues à la hausse ! L’à peu près, c’est ok si tu vends une k7 tous les deux mois ! Je suis plus exigeant sur mes prods, les groupes, la réalisation des prods, des envois (avec les vinyls c’est obligatoire mais la poste, ça reste de la roulette russe ! alors autant faire qu’il n’y ait qu’une balle dans le barillet plutôt que 5, exigeant dans le travail ! Y a des mecs qui te donnent leur argent, faut pas se foutre de leur gueule !

 

8. S'occuper d'une distro est parfois surprenant... On peut être confronté à des gens toujours plus "tatillons", ou simplement qui font "n'importe quoi"... As-tu une petite anecdote à nous offrir? (Comme le mec qui te passes un coup de fil 3 fois par semaine pour te raconter sa vie, te dire oh combien il fait beau dans son patelin, oh combien les vaches laitières y sont charmantes...)

Oh oui, mais ce sont les Métalleux, autant y en a qui en ont rien à foutre de tout, autant d’autres sont des maniaques complets… Y avait un mec qui me précisait qu’il ne voulait voir aucune trace de doigt sur les livrets… merde des livrets noirs, quand ça arrive en trade ça passe par les doigts du mec qui envoie, celui qui reçoit… assurer aucune trace, pas simple… J’ai eu un gars qui m’appelait, assez inopinément (j’avais précisé les horaires, bref), et bon c’était un cas. Mec bourré, qui se rappelait pas son surnom, son pote derrière qui hurle, tout ça pour réserver un CD, qu’il a jamais acheté d’ailleurs… bon suite à ça, j’aime plus trop le téléphone, ça a dû se sentir vu que maintenant quasi personne ne m’appelle et envoie des mails à la place. Des fois je suis bien luné, des fois non. Donc les mecs qui appellent pour rien dire, ils le font pas longtemps.

 

9. Faire une distro proposant principalement des styles de musique underground, et donc pas spécialement vendeurs, est-il toujours synonyme "d'anti-commercial"? Par exemple les exigences du public et les derniers moyens techniques obligent pas mal de distros à se plier à des règles assez nombreuses, au détriment de la personnalité et d'une certaine liberté... Je soupçonne certaines distros "underground" de ne prendre en stock que ce qui se vendra bien, et facilement, sans effort particulier... Dans un sens je comprends cette démarche, car une distro qui ne vend pas ne sert pas à grand chose... Mais finallement que font-ils de plus que de la simple distribution de type hyper marché? La recherche et le soutiens de groupes moins connus (Mais pas forcément "invendables") sont-ils en quelque sorte passés à la trappe?

Si tu veux, il y a un forum où des mecs s’amusent à redéfinir l’underground par rapport à leur vision de la chose uniquement, sans culture de la chose, donc on peut ergoter des heures sur l’aspect « commercial ». Dans l’underground, il peut y avoir des choses commerciales, ou plutôt qui marchent et qui se vendent, sans être des vendus pour autant. Oui certaines distros prétendument « underground » (alors qu’elles n’en partagent pas les valeurs et la culture, et d’ailleurs ne s’en réclament pas, les disques qu’elles distribuent sont UG, c’est tout) sont là pour le pognon et la gloire. Mais ces distros, on les sent venir à des kilomètres, elles surfent sur la vague, mais ne s’avancent pas trop dès lors qu’il s’agit de creuser un peu et voir ce qu’elles ont dans le ventre… On peut perdre les gens derrière de beaux termes abscons et hypes (en ce moment, faut caler Bataille et Cioran, San Antonio, tu passes pour un con, surtout quand tu fais du Black) mais quand tu dois parler de ce qui te fais vibrer, là l’école de commerce elle donne pas les clés en général. Vendre des disques ou de la lessive c’est pareil. Moi ça m’intéresse pas. Je sors les disques qui me plaisent, je me plante assez souvent, je distribue des trucs pas simples, je me plante aussi souvent, mais bon, tant que je vends d’autres trucs, qui vendent… ouais, j’ai vendu un max de CDs de Peste Noire, mais ça ne me dérange pas, puisque j’apprécie la musique, et ça me paye les écueils des invendus. A mon sens, les labels UG, et surtout ceux qui ne vivent pas du business, ils peuvent sortir une prod qu’une boite ne voudrait faire car le risque de plantage est trop important. Je ne dis pas que que les labels style Osmose sortent de la soupe, non, mais s’ils savent pertinemment qu’un groupe va vendre 5 CDs, ils pourront pas se le permettre. Après, l’UG aujourd’hui, pour beaucoup c’est torcher un album tout seul sur un PC au bout de 2 mois de musique. C’est facile de sortir un CD, y a des labels qui tombent dans ce piège du « trop tôt », et puis un CD ça se trade contre un CD c’est cool, mais y a des disques qui ne méritent pas d’en être. Il est loin le temps des 3 démos un EP avant de faire un album…

 

10. Au niveau du déroulement des évennements, tu prends les choses comme elles viennent, en attendant que des groupes te contactent ou que ça se fasse assez "automatiquement" via les courants torrentiels du souterrain, ou tu es plutôt du genre à anticiper ce qui viendra dans quelques mois, à faire des "grosses actions" comme un achat en prix de gros massif pendant quelques semaines, ou une massive réduction du stock via des soldes au raz des pâquerettes? J’ai remarqué qu’il y aurait en quelques sortes deux types de distros/ labels des grottes : Ceux qui attendent que ça vienne en espérant que les grondements du souterrain raisonneront assez, et ceux qui remuent un peu plus et tentent de forcer la main des courants pestilentiels… Bien sur, tout est fait de nuances, mais tu te situerais ou sur une échelle Actif/ Passif? Personnellement, je dirais que je laisse plus couler qu’avant, c’est plus « passif » en un sens, même si la quantité reste assez importante…

Y a des groupes que j’ai envie de faire, et je leur propose un deal, tous n’acceptent pas, d’autres acceptent, et c’est cool de pouvoir sortir un truc d’un groupe que tu adores. Sinon je reçois des promos, plein de mails pourris avec des liens vers des mp3s que je n’écoute jamais. Le dernier truc que j’ai signé, c’est Vortex Of End. J’ai reçu une tape et j’ai trouvé ça excellent, et là j’ai sorti le MCD. Pour la distro, je prends en fonction de ce que je connais, aime, et aussi en fonction de ce que je sais que des gens aiment, et aussi dans des styles que je maîtrise moins, mais j’ai envie de découvrir. Je suis obligé d’être pro-actif parce que j’ai un gros stock et je ne peux pas le laisser dormir et grossir comme ça. Faut que ça parte. Mais j’ai remarqué que j’ai souvent de l’avance, car je chope un truc dont j’entends parler, c’est excellent, mais entre le moment où en France ça se propage, il peut s’écouler 6 mois. C’est frustrant des fois.

 

11. Il parait que vendre sur un stand durant les concerts marche pas mal, peut être plus que via les VPCs... Tu as essayé? Tes impressions négatives et positives? Moi je l'ai tenté une fois et c'est dur de rester assis derrière le "troupeau" alors que le groupe joue et donc qu'on ne voit rien... Et certains mecs te posent beaucoup de questions à la fois ("Ca c'est bien?" "Et ça C'est bien?" "Ca c'est quoi?" "Et ça?? Et ça?? Et ça??" )... J'ai même du me faire chourrer une tape lol... Mais bon ça doit quand même porter ses fruits sur le moyen terme comme certains «distributeurs» continuent depuis des années... Mais sais-tu s'il faut un statut particulier pour se permettre d'installer ses petits cartons et son hamac dans le sous sol humide d'un café puant la bière? Si tu es fervent adeptes du petit marché métal, peut-être que tu t'installes même le dimanche matin dans des braderies? (Un mec dans ma région le fait, il vend pas mal de CDs metal, heavy, death, thrash d'occasion... Et ça a l’air d’aller…).

J’ai déjà fait un stand, oui, et sans parler du stand dans la bagnole, les rencards sur les concerts pour filer à des mecs leur commande, histoire d’économiser le port. Tenir un stand, c’est sympa, tu vends plein de trucs et t’as pas à te faire chier à emballer les disques, tu les files direct… Sinon c’est vrai que rester coincé durant tout un concert c’est chiant, et puis pas question de trop picoler, sinon je ferais de grosses ristournes ou je filerais tout gratoche… J’ai pas trop fait le conseiller, je pense que les gens ont eu peur de moi. Un statut particulier ? ben demande à la Gendarmerie, je sais pas, ou à la Pref… oh t’es un métalleux ou quoi ? Merde, dans le Nord, tu as du bol, y a une bonne concentration de métalleux, dans le Jura, faire un marché local, c’est peine perdue… je connais que 3 métalleux intéressés par l’Underground, et tous ont fait leur propre label… les autres doivent écouter des mp3s…

 

12. Je ne poserais pas de questions sur le Mp3, le téléchargement, car on connaît tous ce sujet par coeur... Mais quand même, dans le contexte actuel ou ça devient galère de vendre des disques (De façon assez "pure" dira-t-on), ou le nombre de potentiels acheteurs a tendance à réduire, ou le fait de faire une distro donne parfois l'étrange impression de "déranger", et bien d'autres... Qu'est-ce qui te motives à continuer? Simplement la passion? Ou tu es resté trop longtemps enchaîné à ta distro et tu n'arrives plus à t'en détacher? (Ah Ah). Si tu étais dans la position de commencer une distro, maintenant, en 2008, le ferais-tu malgré tout ou le contexte (Musical ou personnel?) serait devenu un peu trop chiant pour te laisser tenter par l’aventure?

Ah ben j’allais aborder les mp3s à la question précédente… Ma foi j’hallucine pas mal quand j’entends des histoires sur les djeunz qui ne savent pas ce qu’est un vinyl ou s’étonnent sur le fait qu’on puisse acheter un CD… Il est vrai que les ventes de K7s baissent, c’est indéniable, mais à mon échelle, la baisse du CD, je la ressens pas trop. Ce qui me motive à continuer, ce sont les disques excellents qui sortent, les mecs qui sont contents de découvrir des groupes, et quand je vois les commandes éclectiques, un EP de black, une tape de NSBM, un CD de thrash, un zine thaïlandais, ben ce sont des mecs comme moi, quoi, alors ça me fait plaisir de pas me sentir seul au monde. Et puis on se fait des potes, même par email… Et on les rencontre des fois, c’est cool aussi. Ahhhhhhhhhhhhh me détacher de la distro… argh pas sûr de pouvoir… c’est vrai que c’est tous les jours, et que j’y suis enchaîné… Ca nécessite du temps et de l’abnégation. Ca me fait marrer de voir toutes ces distros qui arrêtent, parce que ouin ça prend du temps, c’est chiant, blabla. En 2008, monter ma distro ? Pas à l’âge que j’ai maintenant, je pense. J’ai monté ma distro selon les canons de l’époque, j’étais une distro parmi tant d’autres, déjà je suis resté (cite moi 5 distros UG qui existent encore depuis 1999) et j’ai évolué, mes goûts ont évolué, regarde j’ai sorti du Black extrême, du thrash extrême et dernièrement Superchrist, un groupe orienté Motorhead/Ratt. Pas dit que j’eusse osé sortir ça en commençant une distro.

 

13. Sur les forums, je vois de plus en plus de listes de particulier qui vendent, échangent leurs CDs d'occasions... Parfois certains vont même un peu plus loin en distribuant quelques démos de groupes locaux, ou quelques CDs de labels étrangers qu'ils aiment... D'ou ma question: A partir de quel moment ça devient une distro à ton avis? C'est une question de quantité? De ventes? De régularité?

Euh, je ne considère pas ça comme des distros en fait… C’est le marché de l’occasion, les mecs se débarrassent ou se font leurs propres échanges… S’ils veulent soutenir leurs groupes locaux, c’est bien aussi, ouais. Bonne idée. Ca leur donne l’impression de faire une distro peut-être, mais c’est pas le même fonctionnement ni le même travail, mais si les mecs se font plaisir, je ne vois pas pourquoi je devrais voir une concurrence déloyale…

 

14. Tu dois peut être distribuer des articles complètement faits maison (D.I.Y. comme on disait avant), comme des casettes à copier ou des CDr à copier envoyés avec une cinquantaine de jaquettes... Combien de temps celà te prends-t-il? Certaines cassettes demandent un minimum d'investissement, de la copie à partir du master CDr, au découpage de la jaquette (Car elle est trop large ou qu'il reste du blanc...Quand le monsieur xXx n'a pas eu le temps), pliage de cette jaquette pour qu'elle rentre dans sa boite, puis découpage et gluage des stickers pour les coller sur les tapes... Au bout de quelques tapes, on arrive quand même à un petit bout de temps...
Alors ça te plait de préparer tous ces articles comme il faut, de bien tout calibrer avec tes petites mains pour que tout soit parfait au moment final de la réception du colis par le «client», en quelques sortes tu deviendrais heureux possesseur d'un kit du petit bricoleur des métaux rares et souterrains, fier comme un gamin avec son kit du petit chimiste!!.. Ou tu n'en as plus rien à foutre comme ça te saoule trop et que tu préfères passer ton temps à des choses plus importantes, alors tu préfères les CDs pros et les pro-tapes bien proprettes… ?

J’ai l’impression de faire de moins en moins de DIY… D’une part parce que je fais moins de tapes qu’avant, mes pochettes sont pro, et mes flyers aussi, du coup je zappe le passage photocopie sauvage et après midi flyer/ciseaux mal aux doigts au bout de vingt minutes… Et d’un autre côté, je suis plus exigeant avec mes traders, car des fois c’est du foutage de gueule… Les pochettes arrivent sur des planches A4, c’est pixellisé, faut découper soi-même, des fois chercher où faut plier pour que ça colle, et une fois la pochette prête, tu te rends compte soit que c’est trop grand pour le boitier, auquel cas un coup de cutter résout le problème, ou pire, que la pochette est trop petite, et là t’espères que t’auras pas un mauvais retour de la part du mec qui aura payé ça…
Comme je disais, je fais moins de K7s qu’avant, donc j’y passe moins de temps, forcément. J’ai pu passer un week end et plusieurs soirées à préparer les commandes de 30 K7s, toutes DIY, et évidemment, une ou deux de 10 minutes, le reste double face… Quand on est dedans, on en a vite marre, surtout que derrière on a pas trop envie de faire patienter le gars qui les commande, et ils sont de plus en plus rares à comprendre que ça se fait pas en une minute et qu’ils ne recevront pas la commande le jour après qu’ils aient envoyé leur chèque… Sur une grosse commande, j’étais même revenu de vacances pour rejoindre le bunker et finir le paquet…

Honnêtement, je suis pas un manuel, alors c’est vrai que je préfère les trucs tous faits ! Des fois j’ai dû jeter des pochettes pour un pliage raté, et des stickers de traviole. Quelle angoisse. En tout cas, le gros du DIY, je dirais, maintenant, c’est pour l’emballage des commandes volumineuses… Comme je garde les paquets des autres, je remets les ingrédients pour tout bien caler. Ca va du bout de polystyrène, du papier journal en langues étrangères (quand c’est Bild, je garde, y a des femmes à poil !!), jusqu’à l’improbable… rouleaux de PQ, de sopalin, de scotch, boîte de biscuits gaufrés russes… les Japonais sont top dans ce domaine. Pas bordélique du tout, mais une fois déplié, les emballages se révèlent être des sacs plastiques. Et putain les flyers. Ca permet de compléter le paquet, mais j’ai l’impression que c’est de plus en plus rare… combien de labels ne comptent que sur une promo internet…. Les flyers DIY, ça c’est la classe. J’ai eu des flyers sud américains au dos d’étiquettes de bouteilles de bières, des flyers thailandais en forme de tête de mort, au dos de feuilles de trucs techniques (recyclage écolo de papier à mort)…
Souvent les gens confondent DIY et excuse pour proposer de la merde. Le DIY c’est de l’artisanat, pas de la contrefaçon vietnamienne qui te pète dans les doigts….

 

15. As-tu déjà voulu distribuer d’autres styles de musique, ou des articles un peu différents qui n’étaient pas spécialement musicaux ? (Comme des magazines, bandes dessinées, fringues gothiques, gadgets plus ou moins sexuels ou autres ?) Tu l’as peut-être même tenté… Dans ce cas comment ça s’est passé ?

Eh bien j’ai essayé avec un peu du style psychobilly FORTEMENT métallisé, histoire de pas trop décontenancer, mais c’est dur. Dur de donner envie aux gens d’essayer. Du coup, eh bien je ne fais plus trop ce genre d’expériences, car au final ça ne sert personne. Ni le distributeur, ni le groupe. Sauf peut-être les deux personnes qui auront acheté et aimé. C’est là le principal, tu me diras, mais le prix à payer… Pour le reste, fringues gothiques, castagnettes et menottes, non, ça ne m’intéresse pas, ça vendrait peut-être, mais je m’en fous. Par contre bédés… ça tombe bien que tu en parles, car j’ai monté une sous-division (et pas au nom de FWP car c’est trop différent) appelée SataniCat Comics, dédiée aux comics à l’esprit Metal. Le premier numéro est sorti, il est signé Nagawika et propose une aventure fun du groupe de speed Acid. Le deuxième numéro devrait être différent, d’un autre artiste, beaucoup plus sombre et glauque. Quoiqu’il en soit, si vous savez dessiner et avez des histoires, vous pouvez me contacter, je recherche des trucs dans les styles Metal/Horror/Gore/Erotique/SF/Heroic Fantasy/Humour. Faut que ce soit Metal et que vous me preniez pas la tête. On fait dans la publication Underground, pas dans le Marvel !

 

16. Qu’est-ce que t’a apporté la distro ? (Hormis les piles de CDs et de K7s dans ta piaule, bien sur).

Hormis des piles de disques jusque dans la salle de bains (je te rassure, c’était juste le temps de quelques heures, le temps de faire de la place ailleurs), oui ben beaucoup de piles de cartons, au point où je ne peux décemment pas inviter de filles dans mon antre depuis plusieurs mois… Et bien hormis cela, çà m’a apporté une part de ma collec perso, une vie antisociale, pas mal de contacts, des amis aux 4 coins du monde, des superbes timbres, et la facilité de trouver certains trucs que, seul dans mon coin, j’aurais eu du mal à choper. Une énorme satisfaction personnelle qui m’est propre, et que beaucoup de gens ont du mal à comprendre.

 

17. Qu'est-ce qui te ferais très plaisir au niveau de la distro? Quels sont tes futurs projets distroïfiés? Merci pour tes réponses...

Très plaisir ? Que les mecs se déchaînent et dévalisent le stock afin que j’ai enfin de la place ! Sinon niveau prods, je viens de sortir le MCD de VORTEX OF END qui concurrence sérieusement les groupes étrangers… Malheureusement les mecs ne portent pas de boucs montés en collier et de clous de 3 mètres, ils n’auront pas l’aura que les plus mauvais du genre ont. Ca empêche pas que ça dépote. Je continuerai avec le LP de VASSAFOR, et un nouveau MCD de SPEAR OF LONGINUS, ainsi que le premier album des Serbes de MOR. Après, tout est possible. Merci pour l’interview ! Die Hard ! et n’oubliez pas de vous ruiner sur www.forgottenwisdomprod.fr.st. Comme mon grand-père disait un lâchant une caisse, «c’est toujours ça que les Allemands n’auront pas».

 

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